Quelques réflexions sur la focalisation visuelle
Conférence
Quelques réflexions sur la focalisation visuelle
Conférence de Felix Thürlemann, professeur à l'Université de Constance.
Quelques réflexions sur la focalisation visuelle
La culture visuelle occidentale est, pour ainsi dire, une culture du potlatch. Le collectionneur a tendance à présenter simultanément dans de grands espaces les œuvres d’art qu’il a acquises pendant une certaine période. C’est ainsi seulement que sa collection peut remplir son rôle premier, celui d’impressionner autrui. Même les grands musées d’art publics – tels le Louvre à Paris, le Kunsthistorische à Vienne ou le Musée des Offices à Florence – sont, de par leur généalogie, redevables de cette logique du potlatch. Pour tout un chacun, la visite d’une de ces collections est un défi majeur. Même l’initié ne peut se dédier à toutes les œuvres exposées qui sont parfois d’une complexité sémantique vertigineuse ; il est obligé de choisir, de focaliser, tour à tour, son attention sur certaines œuvres, et par conséquent de négliger le reste.
Cet acte de focalisation, qui à première vue semble être soumis au seul goût personnel du visiteur, est moins arbitraire qu’on ne pourrait le croire. Par la logique de présentation, par le système des pendants par exemple, chaque œuvre d’art, faisant partie de l’ensemble, porte en elle une charge d’information qui règle sa réception. Ainsi, les œuvres mises de côté restent en quelque sorte actives et guident, souvent à notre insu, la réception de l’œuvre « focalisée », celle sur laquelle porte notre intérêt.
Ces réflexions générales seront illustrées par l’étude d’une photographie des frères Alinari dans laquelle une toile fameuse joue un rôle particulier : l’autoportrait qu’Elisabeth Vigée-Lebrun a peint en 1790, pendant son exil à Rome, pour la collection des portraits d’artistes au Musée des Offices à Florence.
Cette conférence sera suivie d'une table ronde, consacrée à la parution de la revue Histoire de l'art Collage?