Claire Sourdin
Dr. Claire Sourdin
Vita
Claire Sourdin a rédigé une thèse en histoire de l’art moderne à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne intitulée Nature et artifices : la pastorale en peinture en France au XVIIIe siècle qui sera soutenue en décembre 2024. Ses intérêts de recherche portent principalement sur le paysage et les représentations de la vie champêtre à la fin de l’époque moderne (XVIIe-XVIIIe siècles) en peinture, en dessin et en gravure. Ses recherches sur la représentation de la nature l’ont conduite à prendre en compte l’histoire du goût et des sensibilités à cette période. En novembre 2023, elle a co-organisé un colloque sur « L’auctorialité du collectionneur d’estampes (XVIIe-XIXe siècle) », et codirigé l’édition du douzième numéro de la revue Histo.art des Éditions de la Sorbonne, Le fond de l’œuvre. Arts visuels et sécularisation à l’époque moderne paru en septembre 2020. Elle a également participé, entre autres, à l’élaboration d’un Dictionnaire historique et critique des animaux paru en 2024, pour lequel elle a écrit les articles « Berger, représentation » et « Bête à laine, représentation ».
Axes de recherche
Projet de recherche dans le cadre du sujet annuel 2024/26 « Nature » :
François Boucher et la nature : le paysage comme lieu de l’écart (1725-1770)
Ce projet de recherche se propose de questionner la nature à travers l’étude du corpus de la peinture de paysage chez François Boucher suivant deux grands axes : le premier d’ordre économique au sens didactique, c’est-à-dire des éléments organisés formant un ensemble nécessairement construit en peinture. Cette première voie, qui se place du côté de la production de l’œuvre d’art, questionne aussi un rapport topographique de l’espace représenté et de l’identification du lieu que l’on a voulu représenter. La problématique du paysage interroge immanquablement la trilogie agraire ager-saltus-silva qui caractérise et différencie les espaces naturels. Espace clos et souvent ouvert sur le spectateur, les paysages de Boucher présentent presque toujours un locus amœnus opposé au locus terribilis, posant ainsi de fait la question d’une symbolique de l’espace, mais aussi celle de la vraisemblance (corolaire des questionnements sur la vérité). Le choix opéré par le peintre dans la restitution des éléments naturels (plantes, minéraux, animaux) et l’exclusion de certains autres, propres à l’espace paysager tel qu’il se donne à voir véritablement, rendent possible une lecture en creux des éléments absents. Des réflexions autour de la matérialité (dans le cadre notamment du paysage gravé) permettent d’envisager la manière dont, d’un point de vue technique, le peintre restitue la nature dans ses tableaux par des jeux d’empâtement, d’association de couleurs ou encore d’incisions dans la plaque de cuivre dans le cas de la gravure. Enfin, la matérialité de l’œuvre d’art questionne le rapport entretenu (ou distendu) avec une réalité agronomique et botanique de cette période qui n’ont jamais été mises en regard avec ce corpus, tout comme les enjeux politiques de ces espaces naturels au XVIIIe siècle (jardins, terres agricoles, etc.).
Le second axe envisagé est d’ordre social : il s’agira de questionner le paysage comme espace naturel distant du monde, lieu en retrait et espace de retraite. Elle pose la question de la pratique et de l’usage de ces espaces de sociabilité en ouvrant la voie à la question des figures présentes dans ces paysages : leur statut, leurs interactions (entre elles et avec la nature), etc. Le caractère artificiel et chimérique des paysages de Boucher implique une tension entre la poétique fondamentale et le réel. De tels questionnements rendent visibles des effets de projection de l’œuvre sur le spectateur. Nous entrevoyons ici une possibilité expressive et narrative de la nature peinte à travers ces nouveaux éléments de comparaison, par-delà l’impression d’un monde suranné et du caractère factice qui s’en dégage à première vue.